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Vers les profondeurs carmines

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Message  Lyan Jeu 15 Avr - 20:12

(Projet de session en création littéraire. C'est la raison pourquoi Lyan ne connaît pas Rax, pourquoi j'écris au féminin et que je ne dis rien clairement à propos de l'univers propre à Teilia. Les lieux sont vagues et le temps aussi, puisqu'il s'agit d'un travail d'école, je devais garder quelque chose de compréhensible pour le lecteur. Alors ce qui suit sera une histoire plus structuré et différente de Loyauté Conditionnée, que j'écris toujours d'une shoot sans retravailler, et sans me soucier de lecteurs externes.)


« Loyauté Conditionnée »

Il y a des poussières et des bris de verres qui voltigent en maître. Il y a des vents froids qui se faufilent entre les badauds hantant les coins de la pitoyable auberge. Tous saouls ou dépressifs, ils agrippent une choppe à deux mains, leur seul salut. Certains prennent place sur un tabouret, d’autres, dans de quelconques déjections ou encore sur de vieilles flaques de sang séché. Certains sont affalés contre les murs mais d’autre, comme ce couple au bar, arrivent à tenir une discussion décente. Néanmoins, il règne une ambiance sombre et crasseuse, tant que l’aubergiste semble morne et sans vie, tel un automate. Il ne se dérange plus de rien. Pourquoi devrait-il mettre les enfants à la porte ? Pourquoi devrait-il faire le ménage, l’inventaire ou le nettoyage des chambres ? Après tout, il n’espère pas une auberge propre, il n’espère pas des chaises en bonne état ; il n’espère plus.

Certains de ses clients s’accrochent encore aux rêves et aux fantaisies. Si la vie les a abandonnés dans la crasse la plus profonde, jeunes et vieux trouvent refuge dans l’alcool et les rêves. Or, la superstition est omniprésente. Au fond du baril, ils imaginent des êtres et des situations encore plus malchanceuses qu’eux. On raconte l’histoire d’un sang maudit, qui amène l’homme le plus brave, le plus courageux et le plus fier à l’esclavage. On raconte l’histoire d’une succube belle à faire rêver qui promet gloire et richesse à celui qui saura la charmer. Mais leurs regards sont vides d’espoirs ou étincelants d’une perversité encouragée par l’ivresse. La bière coule à flot, le vin est dédaigné et le rhum est louangé. On ne prie pas Dieu : on prie le lendemain.

Nul ne fait exception à la règle. Ni même l’adolescente appuyée au bar, les joues gonflées d’amertume et les yeux hérissés par la haine alors qu’elle observait, blasée, son interlocuteur depuis quelques temps déjà. Celui-ci ne se différenciait pas non plus du lot, avec son sourire mi-charmeur mi-mesquin qui dévoilait néanmoins une mâchoire à la dentition peu ordinaire, rendant sa mâchoire trop carré.

- Élyane, si j'allais voir le tenancier, accepteriez vous un verre de ma personne ? susurra ce dernier en portant un regard gourmand en direction de l’adolescente qui ne fit, avec un haussement d’épaule, rien de plus qu’un faible signe de tête approbatif.

Il se leva alors pour s’incliner petitement avec une certaine dose d’ironie ou de moquerie. Son regard s’illuminait d’un plaisir enfoui, alors qu’il peinait à ravaler le sourire narquois qui tentait de percer son masque de cire.


Il revint peu après avec une généreuse choppe de bière qui fut accueillie par la main frêle d’Élyane, un sourire planant désormais sur le minois de la jeune fille. Sans attendre et sans craindre, elle porta le rebord de la choppe contre
ses lèvres sèches qu’elle humecta un moment du bout de sa langue rosée. Quelques mèches de ses cheveux courts tombaient sur ses yeux pendant qu’elle humait l’odeur qui s’échappait de l’alcool. Ce n’est qu’après qu’elle se décida enfin à prendre une longue gorgée. À ses côtés, l’homme avait repris place et arborait désormais un sourire mesquin.

- L’aimez-vous ? N’a-t-elle pas un goût… merveilleux ? murmura l’homme d’une voix doucereuse.

- Oui… souffla-t-elle en retour, le remerciant d’un sourire naïf. J’ai pas goûté de bières comme ça depuis longtemps… Elle a… un petit truc, non ?

- N’est-ce pas ?

Et il n’arriva plus à tenir. Un rire silencieux vint secouer les épaules robustes de l’homme qui souriait désormais sans retenues. Son masque était tombé. Son teint cireux, ses yeux sombres et enchanteurs, ses doigts faiblement griffus et cette mâchoire anormale englobaient désormais l’ensemble de la pièce, tournés vers l’adolescente perplexe, confuse. Pour sûr qu’elle ne comprenait pas, bien qu'elle le tentait, alternant un regard incertain entre la bière et l'homme aux aspects soudainement vampirique, égarée.

- Maintenant, tu m’appartiens ma pauvre enfant… si tu savais ce que tu viens de faire. Boire à la coupe d’un parfait inconnu sans te soucier de rien, qu’espérais-tu? Ta mère ne t’a donc jamais rien enseigné ?


Hébétée, elle se contenta de garder le silence jusqu’à ce que quelques secondes s’écoulent. Ses yeux s’écarquillaient de plus en plus, une lueur de lucidité passant dans ses yeux ternes. Elle se tenait là, le regard exorbité, sonverre glissant de sa main pour se fracasser conte le sol, répandant la bière sur le carrelage. Effrayée, son regard terrifié fixait l’homme devant elle, son corps peu à peu tremblant. Elle déglutit, puis afficha un sourire incertain. Blaguait-il ? Non, il ne blaguait pas. Disait-il la vérité ? Qu’en sait-elle ? Les vampires existent-ils ? Sûrement, il n’y a aucun besoin de canines allongées pour sucer la vie des gens ; suffit d’un brin de cruauté.

Son monde s’écroulait. Ses pupilles noisette allaient d’un trait à l’autre du visage de son interlocuteur avec une peur grandissante, tentant en vain d’ignorer ses attributs inhumains. Et lui, bien qu’imperturbable, esquissait un drôle de sourire. Il se moquait d’elle ? Il relevait une main griffue, dont le sang tâchait encore sa paume blessée, vers la joue de l’adolescente, qu’il écarta brusquement lorsqu’elle prit la parole.

- Ça n’arrivera jamais ! Je ne serai jamais ton esclave, jamais ! Tu comprends ça !? s’exclama-t-elle en sautant sur ses pieds, sans plus aucune considération pour les clients de toute manière trop saouls pour enregistrer quoi que ce soit. Je te déteste ! Tu es un… un imbécile de menteur stupide et sans… sans… idiot, voilà tout !

- Dis ce que tu veux, ma chère… Mais d’ici trois jours, tu te présenteras agenouillée devant moi en réclamant mon pardon. Souviens-toi, souviens-toi de moi et de mon nom : Rax’Zeï.

Mais elle n’en démordait pas, crachant aux pieds de l’homme avant de se détourner avec fougue. « Des mensonges! » se butait-elle à répéter alors qu’elle s’éloignait, le pas faussement fier et assuré.

La nuit venue, une ombre angoissante peuplait les rêves d’Élyane. Le sang prenait l’identité de la peinture et ce visage si longtemps fixé hantaient le moindre de ses détours. À son réveil, l’impression toujours aussi envahissante d’être surveillée et fixée faisait trembler ses chairs. « Des mensonges, » continuait-elle néanmoins d’affirmer, tentant de tout son âme d’écarter l’hypothèse inquiétante qui s’obligeait néanmoins à elle. Deux nuits s’étalèrent ainsi, si perturbantes qu’elles semblaient influencer le jour. Ses instants d’éveil étaient torturés par une envie déchirante de boire. Aussi engloutissait-elle verre d’eau après verre d’eau, sans jamais être rassasiée. Elle se mit au vin qui ne la combla, pour sa couleur carmine, que peu de temps. L’évidence commençait à percer l’illusion qu’elle tentait de bâtir autour d’elle…

- Il arriverait quoi, si quelqu’un buvait quelques gouttes de sang de vampire ? demandait-elle avec une certaine fièvre à chaque personne susceptible d’être au minimum renseignées.

Les réponses ne variaient pas. Tous lui disaient : « Rien du tout, c’est trop peu ». Aussi acquiesçait-t-elle à chaque fois ; le mensonge qu’elle créait autour d’elle se renforcissant à chaque réponse, pour s’amincir à chaque heure…

Lorsqu’il fut si mince qu’elle n’arrivait plus à s’en faire un voile, ses défenses tombèrent. La résignation se peigna à
son minois blême d’insomnie tandis que son cœur se serra douloureusement à sa poitrine. Tomber. Elle allait tomber. Non, pire, elle allait sauter. C’était inévitable, après tout. Elle ne pouvait pas s’accrocher, elle ne le pouvait plus, ne le voulait plus. Lui et son sang hantait sa moindre pensée, son moindre rêve.


Parce qu’il y avait cette odeur de sang qui lui agressait les narines, qui la poursuivait, plus insistante que jamais. Elle la sentait, comme deux couteaux qui lui transperçaient les poumons, comme une lame qui lui traversait le cœur pour la clouer sur place. Oui, c’est cette sensation là qu’elle ressentait dans chacun de ses rêves. Mais rêvait-elle ? Même si elle avait tenté de l’éviter durant ces deux derniers jours, ces longues mains griffues et froides étaient bien vraies. Ces mêmes
mains qui s’appuyaient contre son torse cette nuit-là pour la maintenir plaquée contre un arbre lui prodiguaient une douleur réelle.

Il y a quelques minutes, elle avait tenté de le fuir, encore. L’adolescente l’avait aperçu au détour d’une ruelle et, prise de panique, s’était contentée de prendre le chemin inverse au pas de course. Bien qu’il ait semblé en discussion avec un autre homme, il n’avait pas manqué de la remarquer et, sans se presser, quitta son interlocuteur pour lui emboîter le pas, souriant. Le souffle haletant, ses pas s’enchaînaient maladroitement, la lune éclairant à peine le chemin de la jeune insomniaque. Sans même s’en rendre compte, elle était de nouveau prise au piège.

Par cette odeur qui était trop près d’elle, par ces mains appuyées contre son corps comme un étau. Il l’avait rattrapé, il l’avait immobilisé.

On dit que la forêt sent bon, mais elle ne sent rien d’autre que le sang. Tout ça à cause de cette mince écorchure au visage de Rax’Zei de laquelle s’écoulait ce damné liquide écarlate. Une blessure bénigne, causée par les mêmes branches qui la ralentissaient. Cette odeur… si tentante. Élyane ne bougeait plus, elle ne le pouvait plus, ne le voulait plus. Son regard était fasciné par cette mince rizière rouge qui coulait contre les joues du vampire, puis sur son propre doigt. Le sang s’accumulait sur l’index de l’enfant, appuyé contre la joue d’ivoire du vampire qui, immobile, secontentait de sourire. Mais elle ne le regardait pas, occupée à relever sa main près de ses propres lèvres, sans plus d’intérêt pour sa situation précaire. Ce sang lui semblait donné, disposé à être bu. Depuis le piège qu’il s’amusait à la torturer de milles et une façon. Il déposait un bouchon de sang lorsqu’elle avait le dos tourné, lui envoyait des lettres écrite à même ce liquide vital, glissait des fonds d’éprouvettes de sang dans ses poches. Sa soif n’avait jamais été repue, jamais. Elle s’était trouvée à imaginer des façons les plus honteuses et angoissantes les unes que les autres pour s’attirer ses bonnes faveurs, tout en le fuyant, tout en s’y refusant. Mais maintenant, il lui semblait que tout était possible, qu’elle pourrait apaiser cette soif terrifiante et oublier à jamais.

Elle fermait alors ses yeux, venant chercher le courage et repousser la morale pour réchauffer sa langue par cette goutte de sang qu’elle récupérait de son doigt.

Sa langue avait à peine accueillis ce goût enivrant que la poigne à son torse se fit plus solide, laissant un gémissement s’échapper des lèvres de l’adolescente. « Il y a un prix, à cela, ma chère… » lui murmura le vampire qui approchait ses lèvres de sa joue, les laissant glisser jusqu’à sa gorge en humant l’odeur qui s’en échappait. Élyane se débattit aussitôt, argumentant avec vivacité qu’une goutte de sang, qu’un dé ou qu’une lettre léchée ne pouvait équivaloir à ce qui l’attendait, mais ses mots étaient vains.

L’étreinte se fit, si douloureuse et sans précaution qu’elle en cria de tout son être. Les crocs de l’homme s’enfonçaient dans sa gorge au même moment où sa respiration se coupa et où son cœur s’étaitmis à battre furieusement. Il avait relâché la poigne sur son torse mais l’avait enlacé de ses deux bras si solidement qu’elle se retrouvait plaquée à son buste, la tête arquée vers l’arrière et les yeux écarquillés par l’horreur. Sa vue s’était embrouillée et ses sens affaiblis. Elle ne sentait plus le froid sur elle, ni les crocs à sa gorge. Pourtant, elle arrivait sans aucun mal à entendre chaque gorgée que le vampire engloutissait. À chacune d’entre elles, elle défaillait au même rythme où elle s’accrochait à lui. Son souffle termina par s’échapper de ses lèvres comme une dernière expiration, mais il n’y avait malheureusement quel’inconscience pour l’accueillir et l’arracher à la mort.

Rax’Zeï, lui, s’écartant lentement de la gorge de la jeune fille, releva ses yeux désormais injectés de sang vers l’adolescente. Un moment silencieux, il extirpa sa langue de manière à venir se lécher les lèvres, cueillant un filet de sang qui s’en était échappé. L’une de ses mains se releva au visage d’Élyane, caressant d’un revers de griffe son minois assoupi et blême.
« Comptes-toi chanceuse d’être encore en vie, Élyane. Si j’avais voulu, j’aurais pu te vider. Cela comble vraiment rien… foutus mortels. » pesta-t-il pour lui-même, relâchant son étreinte autour de sa proie pour la laisser retomber contre l’arbre. Il se releva par la suite, mais demeura un bon moment immobile devant elle, hésitant. Sa mâchoire ensanglantée rendait sa mine d’autant plus effrayante qu’à l’accoutumé mais il demeurait là, incertain. Pouvait-il réellement la laisser là, emprise du froid qui lui causerait sa mort ? Le sang dont il venait de s’abreuver gonflait ses veines avec une vive opposition, agressant son crâne par de farouches pulsions sanguines. Incapable de s’y résoudre, il s’y plia avec un agacement qui accompagna sa confusion. Le vampire se rapprocha de nouveau d’Élyane pour la prendre contre lui, un bras sous le dos et l’autre sous les genoux, tout en tenant avec une certaine attention la tête pendante de sa précédente victime.

La marche fut longue, mais ne parut rien à l’adolescente. Lorsqu’elle ouvrit de nouveau les yeux, nul froid ne venait mordre sa peau. Une longue cape avait été enroulée autour d’elle et la pierre sur laquelle on l’avait déposée la protégeait du vent. Aussi s’éveilla-t-elle doucement, sans brusquerie. Une fois qu’elle s’était remise de son instant de faiblesse, ses sens lui revenaient peu à peu. Sa première pensée fut consacrée à son bourreau. Ses bras lui manquaient déjà, son goût aussi. Comment pouvait-il prendre autant de place à ses pensées, après un tel geste ? Mais la vue ne tarda pas à venir, quoi que brouillée, lui dévoilant un paysage de nostalgie, de souvenirs ; un cimetière. Par la suite, l’ouïe vint. Tardive certes, puisque ce ne fut qu’avec retard qu’elle entendait les paroles qu’un homme mentionnait à haute-voix, visiblement égaré dans ses pensées, l’aspect mélancolique.

Les paroles de Rax’Zei paraissaient tout à fait incohérentes à l’adolescente qui feignait toujours l’inconscience. Ses traits s’étaient quelque peu froncés de curiosité, cherchant à percer la signification de son monologue spirituel. Pourtant, les minutes passaient et elle se détendait, s’apaisait. Son cou était toujours aussi douloureux, mais il lui sembla que son tortionnaire n’était rien d’autre qu’un homme brisé. Sans certitude, elle ne disait toutefois mot.

Mais les pensées n’arrêtaient pas de déferlées à voix haute. Il s’exprimait avec sincérité, appuyé contre une pierre tombale sans lâcher le cimetière des yeux. L’endroit devait le rendre méditatif, puisque sur le visage du vampire se peignait une expression quasi humaine, plus solitaire que jamais.

- Dire que je l’ai traîné dans ce monde obscur… Cette vie misérable que je lui fais subir n’est en rien ma volonté… J’agis sans doute ainsi car à ses yeux, je vois le reflet de la haine dépeinte par les siens. Cette lueur d’incompréhension qui trouve refuge dans la peur me répugne au plus au point. C’est ça qui me fait changer en ce monstre que je ne suis pas…

- Tu… commença-t-elle à répondre d’une voix rauque, encore à demi égarée dans l’épuisement générée suite à l’anémie. Tu es… ? C’est… vrai ?

L’homme était devenu silencieux, dévisageant un instant l’adolescente qu’il n’avait pas cru éveillée. Son regard fut traversé d’un embarras court, rapidement remplacé par son air imperturbable habituel.

- Je ne te demande rien vraiment, Élyane, il avait retrouvé son air calme, un peu supérieur bien que quelque chose différait ; la tendresse. Je t’ai traînée ici, je t’ai traînée dans mon monde. Je ne t’ai pas laissé le choix vraiment, tu as toutes les raisons de me détester.

- C’était brutal et méchant, lui concéda alors l’adolescente qui émergeait peu à peu. Mais si vous aviez besoin d’aide, je ne peux pas vous le reprochez. Je... suis désolé. Pour tout ça, pour la lueur, comme vous dites… ça… ça arrivera plus je...

Il détourna les yeux, cachant par le fait même le trouble qui s’était peint dans ses yeux carmin. « Approche, Élyane », lui commanda alors le vampire pour la faire taire. Il écarta quelque peu le bras, se taisant lui-même par la suite. Surprise, l’adolescente se poussa un peu plus près de l’adulte, relevant son museau vers lui avec incertitude. Le bras qu’il avait écarté se replia alors autour d’elle, l’enlaçant simplement. Sans le moindre mot et avec une certaine routine, il replia son index de manière à venir percer la peau de sa paume de main à l’aide de son ongle griffu, offrant cette dernière à la jeune fille qui le regardait avec une toute nouvelle avidité.

Les joues rosies par la honte, l’odeur enivrait à nouveau son museau. Repoussant tout signe de faiblesse, ses deux mains s’agrippaient au poignet de Rax’Zeï, craignant qu’il ne s’écarte brutalement. Néanmoins, il ne faisait pas, et ne le ferait plus. Élyane avait posé ses lèvres contre la paume d’ivoire de son bourreau, léchant avec gourmandise le sang qui s’en échappait, la tête triturée entre un lot de conflits moraux qu’elle noya dans ce breuvage si longtemps attendu.

Lorsqu’elle fut enfin repue, Élyane releva la tête vers lui, étirant un sourire ravie cerné de dents ensanglantées. C’était à son tour de se lécher les lèvres pour ne pas oublier une seule goutte du sang quilui avait été offert.

Ce n’est qu’après qu’elle écarquilla ses yeux en se renfrognant. Détournant la tête sans pour autant s’écarter du bras qui l’enlaçait, elle échappa quelques marmonnements imperceptibles, bougons et sans queue ni tête avant d’affirmer :

- Maintenant, je n’en boirais plus jamais. C’est fini, j’ai bu, c’est terminé. Je ne suis pas une goule, je suis encore moins un vampire. J’aurai plus besoin de le faire… je vais redevenir comme avant, à vagabonder là et là. Oui, comme avant… sans sang. Même s’il goûte diablement bon : sans sang. Parce que cette partie-là était un mauvais rêve.

- Il faudra bien un jour ou l'autre que tu comprennes Élyane, se contenta de soupirer l’adulte. C’est comme une lumière. Ce n’est qu'un espoir qui au fond, ne fait que briller au loin sans plus. Tu es damné comme je le suis…

Il demeura silencieux un moment, puis ajouta plus bas :

- Je ne suis plus le seul, maintenant… nous sommes deux, et ce pour toujours, Élyane.

- C’est pas vrai, rétorqua-t-elle alors en pinçant les lèvres. Toi tu es immortel, moi pas. Je vais mourir et je partirai. Je suis pas damnée comme tu l’es.

- Certes, mais le jour où tu mourras, je te coucherai dans ton lit et je t’y laisserai comme si tu sommeillais pour toujours. Ensuite, je prierai chaque nuit le Faucheur jusqu’au jour où il décidera de te ramener. Et s’il ne le fait pas… je maudirai son nom pour l’éternité.

Rax’Zei abaissa son visage vers l’avant, posant ses lèvres contre les cheveux de l’enfant qu’il tenait dans ses bras. Il inspira doucement l’odeur de celle-ci, resserrant son étreinte autour de son corps fragile avec une certaine fièvre. « Pourquoi? » s’était enquit l’adolescente avec une certaine angoisse, au vue des paroles mentionnées.

- Parce que… je ne veux pas que tu me quittes… Je ne supporterais pas d’être seul à nouveau, je veux t’avoir près de moi… Écoutes donc mes balivernes et mes divagations de vampire givré, avoua t’il encore plus bas en appuyant l’adolescente contre lui.

Élyane s’en étonna rapidement, le visage teinté de surprise. Elle le cacha néanmoins en enfouissant son minois dans ses vêtements, étouffant par le même geste son embarras. Elle resserra ses bras autour de lui, serrant ses poings dans les replis de son long manteau. Une fois bien emmitouflée, une fois bien masquée, elle avoua.

- Au début, je pensais ne jamais pouvoir te pardonner. Je te détestais, je t'haïssais et je te méprisais. Mais ce soir tu étais devenu si doux, si gentil... Alors je... je me dis… que tu ne mérites peut-être pas d'avoir autant de haine... que tu es ni détestable ni haïssable. Tu t’es ouvert à moi, et c’est… c’est une façade, non ? Je sais que tu… que tu… souffres. Je me dis que je serais bien dans tes bras, comme ça… juste… comme maintenant…

Dés en dés, bouchons en bouchons, elle devenait dépendante de ce sang maudit qui, cette fois-ci, n’avait pas soumis un guerrier brave, fier et courageux à l’esclavage mais simplement une enfant égarée. Puisque qu’aucun des deux, ni Rax’Zeï ni Élyane ne souhaitait retourner chez eux, le temps les rapprocha. Les gouttes de sang se transformèrent en verres, et les verres en litres. Ils échangeaient l’essence même de leur âme, se laissant se perdre dans ce qui est désormais une bien sordide liaison. Leur haine se transforma en respect, leur sentiment d’agir avec immoralité en bien être. La jeune fille et son maitre, le maitre et son vampire. Qui était le chien de l’autre, nul ne le savait plus. Puisqu’avide d’asservissement, le maître s’était lui-même enchainé. « Enchainé à mon esclave, quel imbécile je fus ». Voilà pourquoi les choses ont si rapidement changées, voilà pourquoi Rax’Zeï est tombé : à cause d’une enfant. Car son sang, l’a liant à lui, l’a lié à elle…


(Merci à Rax'Zei pour son active coopération et son aide lorsque je devais faire penser et réagir son personnage. Merci de m'avoir accompagné jusqu'à 4hAm ce matin :') Je respecte aussi ta propriété intellectuelle ! Preuve, tes passages intouchés sont en italiques !)


Dernière édition par Lyan le Mer 12 Mai - 16:36, édité 1 fois
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Message  Lyan Mer 12 Mai - 16:37

[Terminé!]
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Message  Lyan Jeu 17 Juin - 13:35

[Morceau d'une séquence de Loyauté Conditionné, je trouve qu'elle fite mieux là]

La nuit est difficile,
Elle finit dans un mélange de perplexité.
Tu as le droit d'avoir peur de te perdre,
Nous abandonnerons nos adieux.

Mon futur se met en marche progressivement,
Cherchant à nouveau des rêves
Mais il doit déjà nier une part de sa définition :
Être incapable de te pardonner.

Cette nuit on doit écouter prudemment,
Imitant ce raisonnement, je peux changer.

Pour que je sois capable de respirer à ton rythme
Je m'en fiche si tu découpes le futur.
Je m'en fiche si tu découpes le futur.

- C'est... Lyan, c'est toi qui a écrit ça ?
s'enquit le vampire en plissant le regard quelque peu, caressant la page de son index.

- Mh ? Nn nn, je l'ai trouvé, ça traînait... C'est troublant, tu trouves pas..?

- C'est en soit la ressemblance qui me trouble... C'est très beau, vraiment..

Puis, sous le sourire du vampire, l'enfant étira un air amusé, reprenant le carnet en hochant de la tête à quelques reprises. Oui c'est vrai, ce texte était véridique. Le gamin était toujours sujet à des cauchemars et malgré tout, malgré qu'il ne puisse pas dormir, Rax restait à ses côtés toutes les nuits. Il l'observait simplement et était toujours prêt à l'accueillir lorsqu'il se réveillait en sursaut. Même s'il l'avait piégé, il le pardonnait et il était prêt à le suivre n'importe ou, même si le futur venait qu'à partir en lambeaux..

***

- J'ai froid...

Emmitouflée dans sa cape de poil trempé, trop lourde sur ses épaules, l'enfant avait fini par canter mollement. Ainsi, il était couché sur un sol de neige épaisse, les vêtements collant à sa peau, le froid parvenant à ses chairs sans la moindre protection. Mais il restait là, simplement. Il croyait à juste titre que ses membres ne voudraient pas bouger même s'il le souhaitait. Il croyait aussi que son cœur ne voudrait pas se mettre à l'ouvrage, parce qu'il était trop lourd, qu'il le clouait au sol. Aussi, il ne bougeait pas. C'était là une petite silhouette étendue dans la neige, les genoux repliés contre son torse.

Quelque part, il pensait que l'histoire ne faisait que se répéter, à l'envers. Xath' aussi l'avait laissé comme ça dans la neige, étendu comme il était, forcé à y rester couché jusqu'à ce qu'il tombe inconscient. Mais au réveil, le fantôme était à ses côtés, l'accueillant à nouveau dans la réalité. Maintenant, c'était identique. Sauf qu'il ne savait pas si, à son réveil, Rax y serait. La tête bourdonnante, les yeux embrouillés, aucune pensée ne s'enlignait très bien entre elles. Le discours de Rax'Zeï était encore plus incompréhensible maintenant que lorsqu'il l'avait prononcer, plus rien n'allait.

«J'ai peur...» «J'ai soif...» «J'ai froid...»


« Où tu es ? Pourquoi tu es partis ? Tu m'avais promis d'être là pour me coucher, quand j'allais mourir. Tu m'aurais couchée dans mon lit et tu aurais venu dormir toutes les nuits avec moi. Tu l'avais promis. Ou tu es ? Tu devais être à côté de moi pendant ça, tu devais pas me lâcher, même si je te détestais. Tu devais supporter mes coups et mes crises, jusqu'au jour ou ça serait terminé. Où tu es ? Est-ce que tu penses que ça ira mieux si tu pars ? Tu comprends rien.»« Je suis engourdi, pourquoi personne ne vient ? J'ai froid, aussi, et j'ai mal, aussi. Ou vous êtes ? Pourquoi on m'a encore abandonné comme un chien ? J'ai été banni de Citria pour toi, et tu quittes.. je suis engourdis. Je vois plus rien, où est mon guide ? Tu es mon guide, tu es la main qui me guide, c'est à cause de toi que j'ai choisi l'ombre, parce que tu me guidais. Ou tu es ? Il fait noir, Rax, je vois pas ta main, pourquoi tu es parti devant ? La lumière ou le guide, tu m'as fais choisir. J'ai choisi, la lumière elle est loin maintenant, parce que j'ai choisi, elle me boude. Parce qu'elle me boude, elle viendra jamais jusqu'ici, il fait trop noir. Toi, tu es ou ? Même si je vois rien, c'est toi que je suivais, parce que le noir, c'est ton domaine... ou tu es ? Il fait froid, il fait noir, ici..»

- Lyan ? Lyan... ? Lyan ?!
s'écria Naella, sur le chemin du retour, en remarquant le gamin blotti dans la neige.

Toutefois, celui-ci resta silencieux. Le regard dans le vide, les yeux embrouillés et rougis, il semblait quelque peu distant, détaché. Et il le resta toute la soirée. Naella lui parlait et il répondait, mais trop vaguement. Il acceptait les tasses de thé, répondait au question de Pomme, qui prenait son rôle de médecin très à coeur, mais ne sentais aucune étreinte autour de lui. Le bras de Naella lui semblait si léger qu'il n'en avait aucun poids sur les épaules. Le temps était long, et le thé était fade. La plus part du temps, il était silencieux et lunatique, aussi bien qu'on eu fini par lui proposer des somnifères.

- Prends ça Lyan,
lui proposa alors l'orphelin-médecin, mais fait attention et ne mêle pas le rêve avec la réalité.

«De quoi il parle... ? 'M'en fiche... j'en peux plus...» Le gamin, malgré les recommandations de Pomme, avala l'ensemble des somnifères. Sitôt transporté dans le lit, aux côtés de Naella, le sommeil gagna sur son corps épuisé.

***

Il ouvre lentement les yeux, observant autour de lui. À ses côtés, Rax'Zeï est étendu comme à son habitude, un livre à la main pour passer le temps. Toutefois, dès que l'enfant ouvre les yeux, le livre se ferme et son regard se pose vers lui.

- Bon matin, Lyan.

Un sourire ensommeillé se porte sur les lèvres de l'enfant, répondant d'une politesse similaire alors qu'il vient enfouir son minois à proximité de son épaule. Mm, il ne respire toujours pas, son coeur ne bat toujours pas, il est toujours aussi froid, sans chaleur. Il dit que c'est comme une statue, et elle le croit. Mais même si c'est une statue, qu'il n'a pas d'odeur ou quoi que ce soit, être là comme ça lui suffit. Il sent son bras passer doucement autour de lui, comme d'habitude, le ramenant encore un peu plus blotti, puis y laissant son bras. Il sent encore le poids de son bras autour de lui, la proximité de son cou près de son museau, et il s'enivre.

- J'ai soif... avoua l'enfant qui, tenté par la proximité, humait déjà son cou inodore.

Le vampire se contenta d'un sourire, acquiesçant légèrement en levant l'un de ses doigts griffus à son propre cou. D'une griffure, il blessa son cou pour en laissé échapper un fin filet de sang. Après quoi il redressa légèrement le gamin par son étreinte, le replaçant convenablement. Il lui chuchota quelque chose à l'oreille, mais aucun souffle ne vint le dérangé ; évidemment. L'enfant, lui, avait les yeux braqués sur le sang, qu'il vint lapé du bout de la langue, avant d'y poser ses lèvres, gourmand. C'était comme ça depuis tellement de mois, ce rituel, mais ses joues n'arrivaient toujours pas à trahir son embarras. Mais cette fois-ci, il lui semblait que tout le malaise qu'il ressentait n'était plus, puisque son bras l'entourait et que l'odeur de son sang se diffusait dans l'ensemble de la pièce.

- Rax... tu partiras jamais, han ? Tu vas rester là, comme tu m'as promis ? murmura l'enfant en répétant comme d'habitude cette formule incessante, un brin possessive, peut-être.

- T'en fais pas Lyan, je resterai toujours aux cotés de ma petite chérie.
Un sourire se posa sur ses lèvres de la gamine à la réponse, alors qu'elle lécha ses lèvres rougies par le sang carmin. Tu sais... Quand tu mourras, je te coucherais dans ton lit.. et je t'y laisserais, comme si tu sommeillais pour toujours... Et puis... Je prierai Kalos pour qu'il te ramène chaque jour chaque nuit... jusqu'au jour...où il décidera de te ramener.. et s'il ne le fait pas.. Je maudirai son nom pour l'éternité.

- C'est vrai... chuchota l'enfant avec un sourire, nichant son museau contre son torse. Et tu dormiras tous les soirs à côté de moi, pour que je ne fasses pas de cauchemars.

L'adulte acquiesça lentement, resserrant son étreinte autour de l'enfant. Il ne le quitterais pas, il le savait. Ses bras tellement froids l'entouraient et le gardait en sécurité, protégé. L'odeur du sang planait toujours dans la pièce, et il s'en était habitué. Ce n'était pas malsain, c'était leur lien. Et il savait que sans lui, les choses seraient différentes, tellement différentes... Il était le centre de sa vie, sa principale inquiétude, son seul maître, la source de sa loyauté, de sa fidélité. Il était là, irremplaçable et immortel.

- Tu sais, Lyan. Tu es bien la seule vivante que j'aime.
se contente t'il de dire en fermant ses yeux.

- Tu te trompes, c'est "apprécier", le mot, on en a déjà parlé.
s'obstina t'elle alors, les traits un peu froncés d'incertitudes.

- Non je ne crois pas... Je crois avoir un bon vocabulaire et faire choix des bons mots. Allez, tu as oublié que tu devais aller chez Naella, aujourd'hui. Mais je t'attendrai ici, demain matin. Promis.

Je t'attendrai ici, promis... promis... Ici.


***

Ses yeux s'ouvrent avec douceur, encore ensommeillé. Un sourire se glisse sur ses lèvres sèches, pivotant en observant alors Naella toujours assoupie à ses côtés. Ses membres sont lourds, elle ne sait pas trop pourquoi. Elle se relève, s'étire discrètement puis jète un œil enjoué vers Naella. C'est vrai, se dit-elle, j'ai dormi ici ce soir. Elle ne s'en soucie pas davantage, les traits tirés mais le teint revigoré par rapport à la veille, qui semble si loin de ses soucis, présentement.

- Désolé, Naella. Je pars avant que tu te lèves, Rax m'attends, qu'il a dit. Chuchote l'enfant à l'adulte en se penchant vers sa joue, y déposant un baiser furtif. Il ne remarque pas les cernes sous les joues de Naella, qui l'a veillé pendant les deux zéniths sous somnifère.

Il sort de la tour du bout des pieds, puis prend une bonne bouffée de l'air hivernale. D'un soupire satisfait, il tourne le pas et entame le chemin vers sa Tour à lui et à Lui. Oui, il l'y attend, comme tout le temps. Il disait être un homme à la maison, ça l'amusait tout le temps. Et puis, il a promis.

Il l'a promis.

Arrivé au pas de chez lui, l'odeur du sang ne manque pas de prendre d'assaut son museau. Des gouttes de sang et d'autres flaques plus conséquentes sont sur le pas de la porte, séchés et faiblement enneigées. L'enfant demeure perplexe, puis se contente de croire qu'il lui a fait de nouveaux bonbons. Il entre. Le sang continu, c'est une trace, c'est un chemin qui s'ouvre jusqu'à l'échelle, jusqu'à la chambre. Il se contente de croire qu'il a vraiment fait beaucoup de dégâts, jusqu'au foyer. Il monte. Le sang se propageait jusqu'au lit, ou était étendu le Vampire, en de si beaux habits dans ce lit si blanc. «Il est là...» L'enfant s'approche, évitant de s'étourdir par l'odeur de sang de plus en plus tenace à mesure qu'il s'approche du mortan. Sa bonne humeur s'effiloche avec les pas, son sourire devient de moins en moins assuré. Il ne faisait pas des biscuits. Il... dort ? Non, il ne dort jamais. Il s'approche encore un peu, l'esprit embrouillé par autant de sang dans la petite tour aux fenêtres barricadées, le cœur battant par l'appréhension.

Et la réalité le frappe brusquement.

«Où je vais il n'y a que paix...» « Chaque histoire n'est pas heureuse... chaque histoire n'est pas non plus triste... mais chacune finie par voir arriver leur fin un jour ou l'autre » « Il est venu temps pour moi de marcher le fleuve des morts.. en quête de vérité...» « J'ai longtemps marché Lyan.. vu nombre de jour se lever.. d'autre s'éteindre... j'ai regard la fenêtre ceux ci passer et .. je me suis dis... Pourquoi les faire durer si longtemps et ce indéfiniment ? » « Oui Lyan je partirai, mais je serai toujours ici »

Ces paroles brisent l'illusion du rêve trop réel. Pomme l'avait mis en garde. Un flot de souvenirs si brusque... L'enfant sent ses jambes se dérobées sous lui, ses muscles l'abandonné et ses yeux se couvrir de larmes. Il ne sent même pas les sanglots le secouer de part en part, il n'entend même pas les gémissements et les cris qui s'échappent de ses lèvres, il est sourd et muet. Tombé agenouillé à côté du cadavre, il tend la main avec un dernier espoir, agrippant celle du cadavre étendu sur le lit. Si froide... si rude...

- Rax... Rax... !


« Il te seras rendu.. se qui t'es du Lyan... Lyan... N'oublie jamais que je t'aime.
- J'ai déjà dit... que tu te.. trompais de mot..
- Non je ne me suis jamais trompé.. jamais... »


- Nnhhh !

En sanglots, l'enfant se tire jusqu'à l'intérieur du lit, enfouissant son minois à l'intérieur du cou du cadavre, tremblant et gémissant ses larmes et sa rage. Il se blottissait contre ce corps au coeur manquant, aussi froid qu'à son habitude, mais horriblement plus douloureux. « Tu avais pas le droit... fi...fichtre... Tu... tu étais supposé tu... tu... Je fais quoi, maintenant !? Raaaax ! Ça fait mal ! »

Un cri d'agonie ne fait pas de bruit,
Appelant tout ce que j'ai pu connaître
Je suis ici, aux objets trouvés,
Appelant tout le monde.

Les violons entament leurs complaintes
Ils chantent en ton nom, puisque tu ne le peux plus
Leurs son prennent mes larmes,
et les jètent dans l'océan.

Nous vivons un rêve qui se meurt.
Si tu peux comprendre,
Tout ce que j'ai pu connaître
C'est tout ce que j'ai connu

Je demanderai à ton Dieu, quit à prier
Je l'appellerai de nulle part,
Et je lui dirai : Si vous ne le ramener pas,
Veuillez brûler jusqu'à votre dernière cendre.
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Message  Lyan Jeu 17 Juin - 13:53

Première Nuit

Elle n'a plus assez de force pour pleurer. Son regard est juste absent, vide, rivé dans le cou froid du cadavre. Les cernes couvrent ses yeux alors que son corps, épuisé de sangloté, est affaissé dans le lit tout simplement. Cette odeur de sang et d'entrailles lui pique au nez depuis des heures, parce qu'elle en est trop près. Elle sait ce que c'est, toutefois, sans même regarder, elle sait que ça provient de son coeur arraché. Elle ne regarde pas, comme si elle le pouvait. Non, elle se contentait de rester lové contre lui, immobile. Elle sentait son ventre s'ébrouer, se débattre pour avoir quelque chose à manger, mais elle ne bougeait pas.

Ses traits étaient tirés, blêmit, mais elle ne bougeait pas.

Comme elle venait de plus ou moins s'éveiller d'un sommeil sans cesse interrompu, causé par rien d'autre que l'épuisement des larmes, elle vint murmuré au creux de son cou :

- Bon matin, Rax.

«Bon matin, ma chérie», lui répondit le souvenir.

Une larme glissa doucement le long de sa joue alors qu'elle leva un bras pour prendre l'un des siens, le déplaçant jusqu'à ce que la main griffue du vampire soit posé contre ses cheveux roux en bataille. Après quoi elle replaça son bras comme avant, serrant la mâchoire. Faiblement et en tremblant, elle inclinait et relevait la tête quelque peu sans cesse. Ainsi, la main posé à ses cheveux, bien qu'elle ne bougeait pas, variait son poids sur son crâne.

- P... pourquoi tu restes couché...? On... pourrait aller dehors... continua à mi-voix l'enfant, la voix chancelante.

«Parce que c'est, après tout, le seul moment où on est si proche, Lyan»


L'enfant resta silencieux, sanglotant faiblement à nouveau en opinant de la tête sans plus. Il resserra son étreinte autour du cadavre, puis étouffa ses sanglots dans le foulard qu'il portait...
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Message  Lyan Ven 18 Juin - 0:23

Deuxième nuit

Les yeux ouverts dans le vide, toujours dans la même position que la veille, Lyan était engourdis. Ses jambes, trop longtemps immobiles, lui étaient presque étrangères. Le poids du bras de Rax'Zeï autour de lui semblait lui peser une tonne, mais il ne s'en extirpait pas. La tête lourde et bourdonnante, il était sujet à un constant mal de tête et à une faiblesse de plus en plus notable. S'il était éveillé de temps à autre, la grande majorité de ses journées se partageaient entre le sommeil et l'inconscience.

Ses traits désormais creusés entourait son minois livide et sombre, aucun sourire à ses lèvres depuis trop longtemps. Il demeurait dans le silence de leur tour qui n'était que parfois dérangé par sa voix faible et brisée, ou par celle qu'il croyait de plus en plus entendre ; celle du vampire.

Mais au milieu de l'après-midi, une autre voix parvint aux oreilles de l'enfant qui commençait tout juste à se rendormir :

- Lyan !! L yan ouvre moi ! Fais moi un signe quelque chose! Je sais que t'es là... ! Lyan !


C'était la voix de Naella qui brisait son silence. L'enfant fut aussitôt angoissé. Il se souvenait très bien des paroles de la Nargolith l'avant veille et craignait désormais sa présence. Non pas qu'elle fut méchante, il la savait gentille, mais il avait peur plus que tout qu'elle ne lui enlève Rax'Zeï, ou lui en éloigne. Ses propos avaient été si furieux à son égard, l'abandon, le rejet, qu'il ne pouvait que croire qu'elle l'écarterait d'ici. Et ça, il ne le voulait pas.

Or, il resta silencieux.

« Tu peux faire confiance à Naella, Lyan»
se fit entendre le cadavre étendu sur le lit.

- Non, je peux pas. s'obstina l'enfant avec son propre souvenir. Si je la laisse entrer, Rax, elle voudra m'enlever de toi. Et tu sais, j'ai promis de rester là, quoi qu'il arrive.

« Allons...»

- Ssshtt !
lui intimida t'il, crispant légèrement la mâchoire. Si on ne dit rien, et qu'on fait pas de bruit, elle pensera qu'on y est pas.

Son ton s'était alors fait un peu irrité, voir agacé, même si rien n'en pouvait être la cause. Les souvenirs qui lui récitait les paroles du mort demeuraient de son propre fruit, mais il arrivait à s'en rendre colérique. Bien que la faiblesse le clouait au lit, et que ses maux de têtes n'aidait en rien la situation, la soif lui était pire. C'était quelque chose qu'il savait son pire tourment en approche, et qui arrivait à peupler ses rêves de cauchemars. Il n'y a plus de son sang, et bientôt, la soif sera pire que jamais.

Mais, lové contre un cadavre moribond, aux yeux encore bien grands ouverts et à la poitrine trouée, le sevrage risquait d'être dangereux pour la santé autant physique que mental de l'enfant. Dans ses bras se retrouvait sa source de motivation qui malheureusement, n'était plus. Dans peu de temps, le résultat serait donné.
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