Chez les Orphelins

Les mains enfoncés dans ses poches, Lyan se baladait mollement au travers les ruelles des Cents-Pointes, les pieds traînants. Il observait ici et là, plus ou moins attentif, alors que l'agacement se peignait à son minois cernés. «"Tu fais rien de la ville, Lyan" j'vais t'en faire, moi, du je-fais-rien ! Comme si t'en faisais plus, imbécile de Fils-de-Pute !» L'évidence démontrait donc l'irritation éprouvé par le gamin qui, d'un coup de pied, botta une petite roche qui vint se fracasser contre le bâtiment de la boulangerie.

Bâtiment qui fixa longuement.

Son regard se releva vers le haut, lorsqu'une toute petite roche vint tomber à ses pieds. Il y remarqua Tulipe qui, de larges signes de main, lui offrait toutes ses salutations. Chassant son agacement, Lyan la salua en retour puis s'esquiva. De quelques pas, il franchit la ruelle qui le séparait du dit bâtiment pour monter jusqu'à son toit.

- Hé, Tulipe, Goliath, vous faites quoi là ?

- Rien en particulier, ajouta la fillette en haussant ses épaules avec son sourire candide habituel. C'est amusant, ici. C'est comme un immense trésor, on trouve tout partout, nisi ?

Perplexe, Lyan envoya un regard autour de lui, constatant le bazar du marché noir laissé par son propriétaire. D'une moue, il observa le comptoir du coin de l'oeil, abaissa la tête vers le plancher et reposa son attention sur les deux orphelins, songeur.

- Il en a un de vous deux qui serait intéresser à travailler ici ?

Le premier qui tiqua fut Goliath, qui agita rapidement la main en se jetant tout près de Lyan, les yeux brillant. Ce dernier, en gonflant les joues, opina quelque peu du chef. Bien, il avait trouvé son marchand noir. Enfin, apprenti marchand noir... marchand noir quand même... il restait plus qu'à avertir le proprio.

Aussi, après une brève discussion avec les deux gamins, Lyan s'esquiva.

Le jour d'après, il revint sur le toit du boulanger, étirant un sourire vers Goliath en offrant sa réponse.

- Il veut.

Et un marchand général, un.

Spoiler:

Sur sa lancé, Lyan réfléchissait. Goliath semblait se plaire dans le nouveau métier qu'il tâchait d'apprendre, avec la compagnie de Tulipe. Le propriétaire l'avait prit sous son aile et, désormais, il apprenait le métier de commerçant. Bon, c'est sur qu'il ne s'agissait pas du commerçant le plus honnête qui soit que celui qui tient le marché noir, mais c'était toujours bien de l'expérience.

Or, l'enfant semblait impatient à l'idée d'offrir à ses orphelins un métier convenable, différent de celui qu'ils exerçaient en chapardant des biscuits dans la réserve. Si tous étaient plus ou moins promis à un avenir de vagabondage ou de criminalité, il avait bonne espérance à l'idée d'offrir autre chose à ceux qu'il protégeait aujourd'hui.

Il fit donc la tournée des propriétaires. Il alla voir le très multidisciplinaire gérant de la Taverne, de la Boulangerie et du Tailleur pour une brève discussion. Celui-ci, fort ouvert à l'idée, proposa avant même que Lyan ne le fasse.

Aussi revint t'il aux Cents-Pointes, l'esprit songeur, avant de se planquer tout au centre de leur base commune qui leur servait principalement de dortoir pour demander d'une voix forte, aux enfants en âge de travailler :

- Hé, tout le monde ! Y'a ___(Haha vous saurez pas)___ qui veut bien prendre deux orphelins sous son aile. Un des boulots est celui de tailleur. L'un de vous pourrait donc être apprenti-couturier et tenir l'échoppe pendant l'absence du gérant. Il est lui-même doué, alors il devrait vous enseigner comment faire au départ.

- L'autre boulot est celui de boulanger. Même si vous serez dans l'échoppe du même gérant, vous seriez probablement sous l'aile de mon second. C'est lui qui fait toujours à manger, 'souvenez ? Hé bah voilà, lui. Que celui que ça intéresse lève la main, je vais aussitôt aller dire vos noms au gérant, question qu'il vous installe convenablement.

Aussi se laissa t'il tomber dans l'échelle, balayant les orphelins songeurs des yeux qui, déjà, avaient commencés à parler entre eux pour choisir les deux intéressés.

Spoiler:

"J'espère que tu grandiras loin de tout cela,
J'espère que tu auras une vie normale"

Disparu.

À tous les moins, des Cents-Pointes. Les semaines s'écoulaient et le Second n'avait toujours pas reposé les pieds dans la grotte. Pantagruel prenait les choses en main, comme tout bon Caïd, mais sa négligence créait des soucis ici et là, comme toujours. Lyan l'avait toujours dit, il était trop naïf. Le plus étonnant, toutefois, c'était que Lyan ait disparu dans une situation aussi critique.

À Citria, les quelques mendiants postés ici et là pouvaient affirmer que quelques lettres avaient été acheminés à Bill le Borgne, en apprentissage au sein du Clergé. "Apprentissage"... Non, ses amis les plus proches parmi les orphelins savaient pourquoi il y était. La mort d'Emilia l'avait profondément marqué, beaucoup trop. Mais il reviendrait, ils savaient, parce qu'ils leur avait dit. Et il reviendrait encore plus fort qu'avant...

Pourtant, c'est un tout autre message qui arriva chez les Orphelins ce jour-là :

- Je déclare Pomme Second des Orphelins, et ceci, temporairement jusqu'au retour d'un Bill qui a surpasser ses cauchemars. Je le veux fort et droit, d'ici là, Pomme le remplacera. Bien sur, si mon jugement te dérange, Pantagruel, tu peux faire ce qui te plaît.

Faites attention à vous,
je suis désolé, mais il a des choses qui ne peuvent pas être ignorées.

Lyan.